Henry Corbin : l’âme du Coran et le corps du Christ

Mort à la veille de la révolution iranienne, Henry Corbin était pourtant l’antidote au choc des civilisations. Premier traducteur français d’Heidegger, ce chevalier de l’esprit n’a jamais abandonné la quête ontologique de son maître ; il voyagea aux confins de l’Orient pour ramener le Graal. En partant à la recherche de « l’imam caché », Coran vivant et incarné chez les chiites, c’est le mystère du Christ qu’il pénétra.

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Martin Heidegger

Henry Corbin se voyait comme l’héritier d’Heidegger, son premier choc philosophique. Né catholique, converti protestant puis initié franc-maçon, c’est en terre d’islam qu’il retrouva le chemin de l’Être. Battant en brèche l’idée reçue selon laquelle la philosophie islamique se serait éteinte avec Averroès, sa somme En islam iranien démontre qu’elle atteignit son zénith en terre d’Iran. Sohrawardi, condamné à mort par Saladin, avait fait la synthèse entre chiisme, zoroastrisme et néoplatonisme, inaugurant des siècles de poésie mystique. Ces épopées d’antan racontaient la quête par l’homme de son ange : l’initié devait voyager en lui-même pour entrer dans la voie des métamorphoses ; devenir lui-même de la race des anges…

Cherchant le lien entre la poésie persane et la religion chiite, Corbin pose la question de la nature du Coran : pour les sunnites, il n’est qu’une table de la Loi ; pour les chiites, il est un esprit qui vit toujours à travers les Imams. Le Coran n’a-t-il pas été révélé par bribes, par éclairs, tout au long de la vie de son Prophète ? N’a-t-il pas été chanté, gravé dans le cœur avant d’être gravé dans le marbre ? Pour comprendre le « phénomène du Livre Saint », Corbin convoque toute la puissance de la philosophie, dans la tradition iranienne où Socrate et Platon étaient les égaux des prophètes.

L’envers du monde

Platon avait défendu la réalité du monde des idées, ou formes pures, comme matrice de la nature phénoménale. Henry Corbin, lui, défend l’existence d’un monde intermédiaire entre le ciel des idées et la réalité sensible : il le baptise Mundus Imaginalis, « là où les esprits deviennent des corps et où les corps deviennent des esprits ». Cet inter-monde est le royaume psychique où voyagent depuis toujours chamanes, oracles et prophètes ; là où, sans le savoir, le poète puise ses illuminations. Contemporain de Carl Gustav Jung, avec qui il correspondait, Corbin déclare non seulement que l’inconscient collectif existe, mais qu’il est possible de naviguer dans cet océan d’informations. C’est en phénoménologue qu’il aborde la question des apparitions : il s’efforce de comprendre quel est le lieu, « envers du monde », où descendent les révélations et où chantent les anges.

Ibn-Arabi
Ibn Arabi

En plongeant dans la cosmologie iranienne, il découvre que les idées platoniciennes s’incarnent dans l’imagination de l’homme. Si l’initié apprend à dialoguer avec ces archétypes, s’il les suit dans ses rêves, alors ils s’incarneront en lui pour le transformer. Les Noms de Dieu, dont le premier principe est toujours indicible, se dévoilent progressivement à qui les cherche, les désire et les aime. Conformément à la cosmologie néoplatonicienne, l’Être descend de l’Un au multiple : il se manifeste d’abord en idée pure, puis en archétype, puis en phénomène. Pour l’andalou Ibn Arabi, qui disait avoir reçu la visite du Prophète en personne, c’est toute la réalité qui est imagination. L’imagination de l’homme est la part du Créateur en lui ; elle fait de lui l’héritier de Dieu. Les soufis considèrent la vie comme un rêve, une grande illusion, dont il faut se réveiller en déchirant les apparences pour accéder à l’éveil.

La voie de l’amour

Pour les philosophes persans, les anges sont les idées de Platon (ou Noms de Dieu) incarnées dans l’espace mental de l’imaginal : ils viennent nous guider sur les sentiers de l’Être. L’homme est lui-même un ange déchu, qui aspire à remonter à la source de toutes les choses. Il veut retrouver l’unité perdue. Plus il recherche Dieu, nous dit Molla Sadra Shirazi, plus il se rend « présent » à d’autres sphères subtiles de l’Être, qui, en retour, se révèlent à lui. Car cette odyssée spirituelle est une rencontre amoureuse : « Ce que tu cherches te cherche aussi », souriait Rumi. Le monde extérieur se transforme, s’ouvre, en même temps que le monde intérieur se transforme et s’ouvre, comme une rose à l’aurore. Le « fidèle d’amour », de plus en plus habité par les idées et les anges, parle le « langage des oiseaux ». S’abreuvant à la source, il fait Un avec la danse de la nature et des étoiles. Dans une stupeur finale, il réalise que l’ange qu’il pourchassait était sa vraie nature ; l’Autre était lui, androgyne platonicien.

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Carl Gustav Jung

Un hadith prête à Dieu ces mots : « J’étais un trésor caché, j’ai voulu être connu ». Pour voir Dieu, explique Corbin, il faut s’élever jusqu’à lui dans les stations de l’âme : si bien qu’au bout du chemin, c’est le Saint qui contemple son propre visage dans le miroir – c’est le Saint le miroir. La face de l’ange est la face de Dieu qui se dévoile à l’homme, en même temps que la face de l’homme qui se dévoile à Dieu. Carl Gustav Jung avait compris que la quête de soi était la voie alchimique des anciens : la pierre philosophale, la vie éternelle, est l’Être découvert à l’intérieur de soi. Elle se sculpte tout au long de l’existence, comme on sculpte une cathédrale. C’est un corps de résurrection, dit Molla Sadra, ou corps archétypal du soi réunifié : du plomb devenu or. Comme nous le contaient les romans de chevaliers, l’homme est initié par l’amour d’une femme – un ange incarné ! –, à la rencontre de l’Autre et de lui-même. Il devra vaincre ses démons et se transfigurer pour accéder au Graal, à la connaissance de soi. Mais, avant de porter la coupe à ses lèvres, déjà ne sera-t-il plus le même ; son essence sera devenue autre…

L’imam caché

Pour les chiites, le Coran n’est pas un texte. Il est l’ange Gabriel qui chante par la voix du prophète qu’il habite. L’esprit du Coran continue de s’incarner dans les douze Imams succédant à Mahomet, détenteurs des secrets ésotériques. Le meurtre du premier Imam, Ali, par les sunnites, a provoqué le grand schisme à l’intérieur de l’islam. Le douzième Imam, lui, vivrait caché dans un autre espace-temps depuis mille ans. Le secret de sa puissance réside dans son « occultation » : jamais mort, car toujours vivant dans le royaume subtil de l’imaginal, les chiites attendent son retour, sa grande apparition. La légende raconte qu’il ne reviendra que quand le cœur des musulmans sera pur ; alors, le dernier Imam rétablira la justice sur la terre, remettra le monde « à l’endroit ». Comment comprendre la révolution iranienne sans comprendre le messianisme chiite ? L’ayatollah Khomeini n’est-il pas descendu du ciel, dans son aigle de fer, après ses années d’exil ? Ce sont les idées qui mènent le monde ; les idées sont vivantes, elles nous possèdent, et nous mourrons pour elles…

Henry Corbin a dédié sa vie à l’islam chiite. Pourtant, il serait resté chrétien ; il a emporté ce mystère dans la tombe. On sait combien il s’est intéressé au docétisme, courant qui concevait le Christ comme pur esprit. L’appellation « fils de l’Homme » rappelle en effet l’Anthropos céleste, archétype commun aux trois monothéismes. La résurrection de la Bible reste bien étrange : pourquoi Jésus n’a-t-il montré sa chair ressuscitée qu’à ses fidèles, avant de monter au ciel (des idées) ? Comment a-t-il pu apparaître dans une pièce fermée à clef, et pourquoi les pèlerins d’Emmaüs ne l’ont-ils pas reconnu ? De quelle matière était fait le « corps de gloire » qui sortit du tombeau ? En voyageant dans l’Iran éternel, a priori si lointain et si différent, Corbin a paradoxalement résolu la question du corps du Christ. Si Ali, premier Imam, se faisait appeler « second Jésus », c’est que Dieu peut s’incarner à nouveau… Le Christ peut revenir, tel l’imam caché du Coran, car l’ange s’incarne en chaque fidèle qui le cherche, en fait sa demeure et s’engage dans la voie de la transfiguration. On retrouve, alors, la trinité Dieu-esprit-homme sous un jour nouveau : nous ne sommes que poussière, mais nos corps sont des temples.

L’imaginal est donc, à l’inverse du divertissement occidental, une voie de transformation de soi. René Guénon pourfendra l’empire de la raison, qui a confisqué la possibilité même de communiquer avec ce qui meut l’univers. Nous avons perdu nos ailes ; nos rêves ne nous parlent plus la nuit. Le rituel catholique est trahi : le pain est redevenu du pain, le vin est redevenu du vin. Comment le Christ pourrait-il revenir, si son royaume a disparu de nos cartes ? Heidegger s’effrayait de la réduction du monde, par la raison, à un grand système technicien. « Seul un Dieu peut encore nous sauver », lançait-il aux abîmes. Son meilleur élève rendait à l’imagination sa couronne, dans l’espoir que fleurissent à nouveau les cathédrales, les pyramides ; que la cité des hommes soit le royaume des anges…

Averroès : l’accord de la religion et de la philosophie

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« Les trois philosophes » de Giorgione.

Le grand philosophe et juriste andalou Ibn Rushd, plus connu en Occident sous le nom d’Averroès, a exercé non seulement une influence magistrale sur la pensée musulmane mais aussi sur l’Occident dès l’époque de Saint-Thomas d’Aquin. Toute sa vie, Averroès a exposé sa méthodologie et sa conviction intime : philosophie, science et religion participent de la même Vérité et de la même Réalité, et de ce fait s’accordent parfaitement. Mizane.info inaugure la présentation annotée d’une série de textes issus de son ouvrage « L’accord de la philosophie et de la religion », extraits de la traduction de Léon Gauthier publiée à Alger en 1905.

Si l’œuvre de la philosophie n’est rien de plus que l’étude réfléchie de l’univers en tant qu’il fait connaître l’Artisan (je veux dire en tant qu’il est œuvre d’art, car l’univers ne fait connaître l’Artisan que par la connaissance de l’art qu’il révèle et plus la connaissance de l’art qu’il révèle est parfaite, plus est parfaite la connaissance de l’Artisan), et si la Loi religieuse invite et incite à s’instruire par la considération de l’univers, il est dès lors évident que l’étude désignée par ce nom de philosophie1 est, de par la Loi religieuse, ou bien obligatoire ou bien méritoire.

Que la Loi divine invite à une étude rationnelle et approfondie de l’univers, c’est ce qui apparaît clairement dans plus d’un verset du Livre de Dieu (le Béni, le Très-Haut).

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Lorsqu’il dit par exemple: « Tirez enseignement [de cela], ô vous qui êtes doués d’intelligence ! » (Coran 59, 2); c’est là une énonciation formelle montrant qu’il est obligatoire de faire usage du raisonnement rationnel, ou rationnel et religieux à la fois.

De même, lorsque le Très-Haut dit: « N’ont-ils pas réfléchi sur le royaume des cieux et de la terre et sur toutes les choses que Dieu a créées ? » (Coran 7, 184) ; c’est là une énonciation formelle exhortant à la réflexion sur l’univers.

Le syllogisme, une obligation coranique

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Le Très-Haut a enseigné que parmi ceux qu’Il a honorés du privilège de cette science fut Ibrahîm (le salut soit sur lui), car Il a dit : « C’est ainsi que nous fîmes voir à Ibrahim le royaume des cieux et de la terre (Coran 6, 75), etc.).

Le Très-Haut a dit aussi : « Ne voient-ils pas les chameaux, comment ils ont été créés, et le ciel, comment il a été élevé ! » (Coran 88, 17) (…) et de même dans des versets innombrables.

Puisqu’il est bien établi que la Loi divine fait une obligation d’appliquer à la considération de l’univers la raison et la réflexion, comme la réflexion consiste uniquement à tirer l’inconnu du connu, à l’en faire sortir, et que cela est le syllogisme, ou se fait par le syllogisme, c’est pour nous une obligation de nous appliquer à l’étude de l’univers par le syllogisme rationnel; et il est évident que cette sorte d’étude, à laquelle la Loi divine invite et incite, prend la forme la plus parfaite quand elle se fait par la forme la plus parfaite du syllogisme, qui s’appelle démonstration.

C’est un devoir pour nous de nous aider dans notre étude de ce qu’ont dit, sur ce sujet, ceux qui l’ont étudié avant nous, qu’ils appartiennent ou non à la même religion que nous; car l’instrument, grâce auquel est valide la purification, rend valide la purification à laquelle il sert, sans qu’on ait à examiner si cet instrument appartient ou non à un de nos coreligionnaires : il suffit qu’il remplisse les conditions de validité. Averroès

Puisque la Loi divine incite à la connaissance, par la démonstration, du Dieu Très-Haut et des êtres qu’Il a créés, comme il est préférable ou même nécessaire, pour qui veut connaître par la démonstration Dieu (le Béni, le Très-Haut), et tous les autres êtres, de connaître préalablement les diverses espèces de démonstration et leurs conditions (…) et comme cela aussi n’est pas possible à moins de connaître préalablement celles des parties du syllogisme qui viennent les premières (je veux dire les prémisses) et leurs espèces; – il est obligatoire pour le croyant, de par la Loi divine, dont l’ordre de spéculer sur les êtres doit être obéi, de connaître, avant d’aborder la spéculation, les choses qui sont pour la spéculation comme les instruments pour le travail.

Le syllogisme n’est pas une innovation religieuse

De même que le jurisconsulte (faqih) infère, de l’ordre d’étudier les dispositions légales, l’obligation de connaître les diverses espèces de déductions juridiques, de savoir lesquelles sont des syllogismes concluants et lesquelles n’en sont pas, de même le métaphysicien doit inférer de l’ordre de spéculer sur les êtres l’obligation de connaître le syllogisme rationnel et ses espèces.

Et à plus juste titre: car si de cette parole du Très-Haut: « Tirez enseignement, ô vous qui êtes doués d’intelligence ! », le jurisconsulte infère l’obligation de connaître le syllogisme juridique, à plus forte raison le métaphysicien en inférera l’obligation de connaître le syllogisme rationnel.

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Université d’Al-Azhar, au Caire.

On ne peut objecter que cette sorte de spéculation sur le syllogisme rationnel soit une innovation (bid’aa) [ou hérésie], qu’elle n’existait pas aux premiers temps de l’Islam ; car la spéculation sur le syllogisme juridique et ses espèces, elle aussi, est une chose qui fut inaugurée postérieurement aux premiers temps de l’Islam, et on ne la considère pas comme une innovation [ou hérésie].

Nous devons avoir la même conviction touchant la spéculation sur le syllogisme rationnel.

Si quelqu’un avant nous s’est livré à de telles recherches, il est clair que c’est un devoir pour nous de nous aider dans notre étude de ce qu’ont dit, sur ce sujet, ceux qui l’ont étudié avant nous, qu’ils appartiennent ou non à la même religion que nous; car l’instrument, grâce auquel est valide la purification, rend valide la purification à laquelle il sert, sans qu’on ait à examiner si cet instrument appartient ou non à un de nos coreligionnaires : il suffit qu’il remplisse les conditions de validité.

Un rapport décomplexé mais critique à la philosophie grecque

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Par ceux qui ne sont pas nos coreligionnaires, j’entends les Anciens qui ont spéculé sur ces questions avant l’islam.

Si donc il en est ainsi, et si tout ce qu’il faut savoir au sujet des syllogismes rationnels a été parfaitement étudié par les Anciens, il nous faut manier assidûment leurs livres, afin de voir ce qu’ils en ont dit.

Si tout y est exact, nous l’accepterons; s’il s’y trouve quelque chose d’inexact, nous le signalerons.

Quand nous aurons achevé ce genre d’étude, quand nous aurons acquis les instruments grâce auxquels nous pourrons étudier les êtres et montrer l’art qu’ils manifestent, (car celui qui ne connaît pas l’art ne connaît pas l’œuvre d’art, et celui qui ne connaît pas l’œuvre d’art ne connaît pas l’artisan), nous devrons entreprendre l’étude des êtres, dans l’ordre et de la façon que nous aura enseignés la théorie des syllogismes démonstratifs.

L’étude des livres des Anciens est obligatoire de par la Loi divine, puisque leur dessein dans leurs livres, leur but, est précisément le but que la Loi divine nous incite à atteindre ; et celui qui en interdit l’étude à quelqu’un qui y serait apte, c’est-à-dire à quelqu’un qui possède ces deux qualités réunies, en premier lieu la pénétration de l’esprit, en second lieu l’orthodoxie religieuse et une moralité supérieure, celui-là ferme aux gens la porte par laquelle la Loi divine les appelle à la connaissance de Dieu.

Il est clair, aussi, que nous n’atteindrons pleinement ce but, la connaissance des êtres, qu’en les étudiant successivement l’un après l’autre, et à condition que le chercheur suivant demande secours au précédent, comme cela a lieu dans les sciences mathématiques.

Supposons, par exemple, qu’à notre époque la connaissance de la géométrie fasse défaut, qu’il en soit de même de celle de l’astronomie, et qu’un homme veuille découvrir, à lui seul, les dimensions des corps célestes, leurs formes, et les distances des uns aux autres.

Certes, il ne pourrait pas connaître par exemple la grandeur du Soleil par rapport à la Terre, ni les dimensions des autres astres, fût-il le plus perspicace des hommes, sinon par une révélation ou quelque chose qui ressemble à la révélation.

Et si on lui disait que le Soleil est plus grand que la Terre environ cent cinquante ou cent soixante fois, il taxerait de folie celui qui lui tiendrait un tel propos ; et pourtant c’est une chose démontrée de telle manière en astronomie, que quiconque est versé dans cette science n’en doute point.

La seule vérité comme argument d’autorité

Mais la science qui admet le mieux, à ce point de vue, la comparaison avec les sciences mathématiques, c’est la science des principes du droit et le droit lui-même, dont la théorie ne peut être achevée qu’au bout d’un temps fort long.

Si un homme voulait aujourd’hui, à lui seul, découvrir tous les arguments qu’ont trouvés les théoriciens des différentes écoles juridiques, à propos des questions controversées qui ont été objet de discussion entre eux, dans la majeure partie des pays de l’Islam, en dehors du Maghreb, il serait digne de moquerie ; car cela est impossible, outre que ce serait recommencer une besogne déjà faite.

C’est là une chose évidente par elle-même, et vraie non seulement des sciences théoriques mais aussi des arts pratiques: car il n’y en a pas un qu’un homme puisse, à lui seul, créer de toutes pièces.

Que dire par conséquent de la science des sciences et de l’art des arts qui est la philosophie (hikma) !

S’il en est ainsi, c’est un devoir pour nous, au cas où nous trouverions chez nos prédécesseurs parmi les peuples d’autrefois, une théorie réfléchie de l’univers, conforme aux conditions qu’exige la démonstration, d’examiner ce qu’ils en ont dit, ce qu’ils ont affirmé dans leurs livres.

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« L’école d’Athènes » par Raphaël.

Ce qui sera conforme à la vérité, nous l’accepterons avec joie et avec reconnaissance; ce qui ne sera pas conforme à la vérité, nous le signalerons pour qu’on s’en garde, tout en les excusant2.

Donc, cela est évident maintenant, l’étude des livres des Anciens est obligatoire de par la Loi divine, puisque leur dessein dans leurs livres, leur but, est précisément le but que la Loi divine nous incite à atteindre ; et celui qui en interdit l’étude à quelqu’un qui y serait apte, c’est-à-dire à quelqu’un qui possède ces deux qualités réunies, en premier lieu la pénétration de l’esprit, en second lieu l’orthodoxie religieuse et une moralité supérieure3, celui-là ferme aux gens la porte par laquelle la Loi divine les appelle à la connaissance de Dieu, c’est-à-dire la porte de la spéculation qui conduit à la connaissance véritable de Dieu.

Les déviances sont accidentelles et non essentielles

C’est là le comble de l’égarement et de l’éloignement de Dieu le Très-Haut. De ce que quelqu’un erre dans ces spéculations, soit par faiblesse d’esprit, soit par vice de méthode, soit par impuissance de résister à ses passions, soit faute de trouver un maître qui dirige son intelligence dans ces études, soit par le concours de toutes ces causes d’erreur ou de plusieurs d’entre elles, il ne s’ensuit pas qu’il faille interdire ce genre d’études à celui qui y est apte.

Car cette sorte de mal, qui en résulte, en est une conséquence accidentelle et non essentielle; or, ce qui, par nature et essentiellement, est utile, on ne doit pas y renoncer à cause d’un inconvénient accidentel. (…)

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Averroès.

Oui, celui qui interdit l’étude des livres de philosophie (hikma) a quelqu’un qui y est apte, parce qu’on juge que certains hommes de rien sont tombés dans l’erreur pour les avoir étudiés, nous disons qu’il ressemble à celui qui interdirait à une personne altérée de boire de l’eau fraîche et bonne et la ferait mourir de soif, sous prétexte qu’il y a des gens qui se sont noyés dans l’eau; car la mort que l’eau produit par suffocation est un effet accidentel, tandis que la mort causée par la soif est un effet essentiel et nécessaire.

Le mal qui peut résulter accidentellement de cette science [ou art, la philosophie,] peut aussi résulter accidentellement de toutes les autres sciences [ou arts].

Combien de jurisconsultes (fouqa’as) ont trouvé dans la jurisprudence l’occasion de se débarrasser de bien des scrupules et de se plonger dans les biens de ce monde !

Nous trouvons même que la plupart des jurisconsultes [en usent] ainsi, et pourtant leur science [ou art], par essence, exige précisément la vertu pratique.

Par conséquent, la science qui exige la vertu pratique comporte à peu près les mêmes conséquences accidentelles que la science qui exige la vertu scientifique.

Puisque tout cela est établi, et puisque nous avons la conviction, nous, musulmans, que notre divine Loi religieuse est la vérité, et que c’est elle qui rend attentif et convie à ce bonheur, à savoir la connaissance de Dieu, Grand et Puissant, et de ses créatures, il faut que cela soit établi également pour tout musulman, par la méthode de persuasion qu’exige sa tournure d’esprit et son caractère.

Notes de la rédaction

1-Ibn Rushd (Averroès) emploie deux termes distincts : « falasifa » et « hikma ». Le premier a un sens spécifique. Il désigne la philosophie grecque et celle des philosophes hellénisants. Ce vocable intègre la connaissance au sens scientifique du terme (astronomie, arithmétique, géométrie, etc) à une époque où science et philosophie étaient indistincts.

Le seconde terme (hikma) désigne la sagesse, qui correspond à l’étymologie grecque du philosophe (ami de la sagesse) ainsi qu’à la mention coranique, et revêt de ce fait un sens plus large et non circonscrit à la seule discipline philosophique. Nous mentionnerons le second usage (hikma) pour les différencier.

2-En logique, le syllogisme est un raisonnement logique mettant en relations trois propositions : deux d’entre elles, appelées « prémisses », conduisent à une « conclusion ». Aristote a été le premier à le formaliser dans son Organon.  L’exemple de syllogisme le plus célèbre est : « Tous les hommes sont mortels, or Socrate est un homme; donc Socrate est mortel ».

3-Si Averroès plaide pour la conjugaison et l’articulation de la religion et de la philosophie dans leur commune entreprise de vérité, ce plaidoyer n’est pas inconditionnel. Il exige la rigueur et la maîtrise du savoir propre à l’élite que constituent les savants, ainsi qu’une certaine éthique qu’ils doivent combiner à lui et qui en est comme le fruit le plus naturel.

Nous sommes loin ici d’un mariage démocratique et sans exigence entre religion et philosophie comme la modernité peut en offrir quelques exemples, Averroès servant souvent de prête-nom à une telle démarche.

4-On observe comment Averroès entretient un rapport libre mais critique avec les Anciens. C’est une différence notable avec la rupture cartésienne d’avec la scolastique perceptible dans le Discours de la méthode.

Chez Averroès, il s’agit d’un dépassement du double taqlid (imitation aveugle) envers la tradition religieuse ou la tradition philosophique et vers une réconciliation ou accord entre deux langages exprimant une même vérité ontologique et métaphysique.

On ajoutera, en outre, le tact et la bienveillance de cette approche averroïste, non sectaire car confiante d’elle-même, qui n’est pas sans rappeler ce que Taha Jabir al ‘Alwani nommait dans un de ses ouvrages « L’éthique de la divergence » (adab al ikhtilaf).

A lire également :

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Sourate 76. L’homme (Al-Insan) / Récitation en VO & Traduction en Français par Saad Al-Ghamidi

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La pluralité religieuse selon le Coran et en Islam (S5.verset 48)

La pluralité religieuse selon le Coran et en Islam (S5.verset 48) dans Islam coraniste versets-dans-le-Coran

La question est d’importance : l’Islam est-il la seule religion agréée par Dieu et, par conséquent, quelles valeurs ont les autres religions monothéistes ? Cette réflexion théologique s’inscrit donc directement dans le prolongement d’une question essentielle : le Salut universel,[1] sujet que nous avons publié le mois dernier.

Selon le Coran, ce n’est point leurs religions qui sauvent les hommes au Jour du Jugement, mais leur foi et leurs actes, ceci alors que toutes les communautés religieuses soutiennent que seule leur religion est valide aux yeux de Dieu. En d’autres termes : en dehors de nous, point de Salut ! Par ailleurs, le verset S5.V48 mentionne la quatrième et dernière occurrence d’un terme lié à la racine shara’a[2] et sa signification littérale ainsi que la surinterprétation dont il fait l’objet ne sont pas sans conséquence sur la conception et le rapport à l’altérité qui structurent l’intime des musulmans.

  • Que dit l’Islam ?

L’Islam orthodoxe, tant sunnite que chiite, proclame selon un large consensus que la seule religion agréée par Dieu est l’Islam. Ce point est indiscutable, ou du moins indiscuté. Il structure profondément l’imaginaire musulman collectif, il est le fondement du perçu mythologique des musulmans, la référence de soi et, donc, de l’autre, l’altérité. Les conséquences d’une telle exclusive en matière de dialogue interreligieux sont capitales.

Cette exclusion de l’autre est basée sur le triple concept suivant : 1– Exclusive de la foi : seule ma foi est juste et valable ; 2– Exclusive de la religion : seule ma religion est agréée par Dieu ; 3– Exclusive du Salut, seules ma foi et ma religion permettent d’obtenir le Salut dans l’Au-delà. Les versets-clefs mis en jeu par l’Islam pour soutenir sa position exclusiviste sont principalement envisagés en deux autres articles.[3]  Enfin, il va de soi que cette position exclusiviste est la source réelle et profonde de toutes les formes de violences religieuses, cf. Violence et religions, l’Islam et le Coran.[4]

  • Que dit le Coran ?

Le Coran soutien exactement le contraire de ce que l’Islam affirme, à savoir : 1– Non-exclusive de la foi : toutes les formes de foi monothéiste malgré leurs différences apparentes sont fondamentalement équivalentes ; 2– Non-exclusive de la religion : toutes les formes religieuses d’expression de la foi personnelle sont équivalentes ; 3– Non-exclusive du Salut : toutes les formes de foi et de religion permettent d’obtenir le Salut, voir : Le Salut universel selon le Coran et en Islam.[5] Présentement, c’est au travers de l’analyse de S5.V48 que nous étudierons le principe général coranique : la notion de pluralité des religions, paradigme plus qu’essentiel.

Voici la traduction littérale[6] de notre verset référent, S5.V48 :

« [Ô Muhammad] Nous t’avons révélé le Livre/al–kitâb [le Coran] en toute vérité, confirmant partie de ce qui lui est antérieur de la Bible/al–kitâb et se portant garant/muhayminan de cela. Juge donc à leur sujet d’après ce que Dieu a révélé et ne suis point leurs désirs/ahwâ’a quant à ce qui t’est parvenu de la Vérité. Toutefois, à chacun d’entre vous Nous avons indiqué une voie générale/shir‘a et une voie spécifique/minhâj. Et si Dieu l’avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté religieuse/umma, mais il en est ainsi afin que vous puissiez exprimer/li-yabluwa-kum ce qu’Il vous a donné. Rivalisez donc en bonnes œuvres, c’est vers Dieu que vous retournerez tous ensemble, et Il vous informera sur ce en quoi vous divergiez. »[7]

 

– Concernant l’Analyse lexicale,[8] trois termes sont à préciser :  shir‘a ; minhâj ; umma. Le mot shir‘a dérive étymologiquement de la racine shara‘a et signifie corde, ligne droite, chemin droit, conduite, manière d’agir. En fonction du propos global du verset et en comparaison au sens de minhâj/chemin bien tracé [9] indiquant une voie plus étroite, mais plus précisée que celle connotée par le terme shir‘a, nous rendrons donc shir‘a par voie générale et minhâj par voie spécifique, d’où pour le segment-clef : « à chacun d’entre vous Nous avons indiqué une voie générale/shir‘a et une voie spécifique/minhâj », nous y reviendrons infra. Pour le terme umma, ici traduit par communauté religieuse, voir : La Umma, la meilleure communauté selon le Coran et en Islam.[10]

– Concernant l’Analyse contextuelle,[11] le contexte d’insertion est rappelé par le segment « confirmant partie de ce qui lui est antérieur de la Bible/al–kitâb et se portant garant/muhayminan de cela » lequel segment inscrit le Coran dans la lignée de la Bible. Le sens du mot kitâb/Bible se déduit ici des vs44-46 où il est fait référence à la Thora des juifs et à l’Évangile des chrétiens. Pour autant, ce rapport est critique et le Coran ne confirme et ne se porte garant que d’une « partie » de la « Bible/min al–kitâb ». Puis, il est rappelé à Muhammad que ce contenu doit être jugé non pas à l’aune de la révélation qu’il reçoit, mais en fonction de ce que Dieu a révélé à tous : « juge donc à leur sujet d’après ce que Dieu a révélé ». En effet, l’on note qu’au début du verset le verbe révéler/anzala était référé directement à Muhammad : « anzalnâ ilayka/Nous t’avons révélé », le Coran donc, mais qu’en notre segment ce verbe est employé sans complément pronominal : « mâ anzala–llâhu/ce que Dieu a révélé », expression qui ne peut alors que concerner la partie dont le Coran se dit présentement la « confirmant » et s’en « portant garant ».

Cette part commune n’est pas de nature religieuse puisque plus avant il est précisé que Dieu n’a pas voulu d’homogénéité religieuse : « et si Dieu l’avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté religieuse »,[12] mais relève donc du dogme partagé, la foi monothéiste, foi qui est sous-entendue de manière non ambiguë par le segment « rivalisez donc en bonnes œuvres », l’agir vertueux étant dans le Coran constamment relié à la foi par la formule maintes fois réitérée et bien connue : « ceux qui croient et agissent vertueusement ».[13] Le Coran précise alors qu’à partir du moment où cette foi monothéiste est conservée, peu importe les formes religieuses : « toutefois, à chacun d’entre vous Nous avons indiqué une voie générale/shir‘a et une voie spécifique/minhâj ». Comme il ressort du contexte d’insertion, il s’agit ici tout spécialement du Judaïsme et du Christianisme.

– Il est donc validé en ce verset que la pluralité religieuse est compatible avec la notion de foi monothéiste universelle telle que le Coran l’entend et la défend.[14] Plus encore, le « Nous » indique clairement que Dieu a souhaité et insufflé cette polyphonie d’expressions. La pluralité religieuse ne nuit donc en rien à la communauté de foi. Au contraire, elle multiplie les possibilités pour les croyants d’obtenir un cadre en lequel ils vont pouvoir traduire au mieux leur foi personnelle : « afin que vous puissiez exprimer/li-yabluwa-kum[15] ce qu’Il vous a donné », ce que confirme le segment « rivalisez donc en bonnes œuvres ».

 

En d’autres termes, toutes les religions se disant monothéistes sont équivalentes et aucune n’est meilleure qu’une autre, seule la vertu individuelle vaut auprès de Dieu. Un autre verset conjoint cette notion de vertu comportementale élective et la notion de diversité humaine dont nous venons de constater qu’elle justifie la pluralité religieuse : « Ô Hommes ! Nous vous créons d’un mâle et d’une femelle et Nous vous avons fait peuples et tribus afin que vous vous entre-connaissiez. En vérité, le plus noble auprès de Dieu est le plus pieux ; Dieu est parfaitement savant et informé. »[16]

 – En cette perspective, la notion de voie/shir‘a, à ne pas confondre bien évidemment avec celle de sharî’a,[17] évoque l’idée d’orientation globale de ce que seront les religions issues d’une révélation par l’intermédiaire d’un prophète particulier, en l’occurrence Moïse, Jésus ou Muhammad, shir‘a vaut donc bien ici pour « voie générale ». Il est ainsi clair que Judaïsme, Christianisme et Islam partagent la même foi monothéiste, mais diffèrent par leurs lignes de pensée théologique constituant l’architecture de leurs représentations du rapport de la foi à Dieu.

Cette coloration est propre à chacune de ces religions et en conditionne pour partie les caractéristiques théologiques lors de leur construction historique. Par ailleurs, le terme minhâj rend la notion de chemin, et cette différence terminologique indique clairement par effet de comparaison que la dimension n’est plus ici théologique. Nous pouvons en déduire sans risque que le minhâj/chemin représente la deuxième composante des religions : l’aspect concret de leurs réalisations, rites et cultes notamment, ce terme vaut donc bien ici pour « voie spécifique ».

– Nous pouvons à présent vérifier cela concernant l’application de ce verset à l’Islam en devenir dont il est aussi dit, comme nous l’avons signalé ci-dessus, que le Coran en indique la « voie générale/shir‘a » et la « voie spécifique/minhâj ». La voie théologique générale/shir‘a tracée par le Coran est claire : un monothéisme absolu, un Dieu unique sans hypostases, sans comparaison aucune, transcendant, seul créateur et administrateur du monde, Maître du Jour du Jugement. Cette théologie n’est réellement ni celle du judaïsme ni celle du christianisme. Néanmoins, la « voie spécifique/minhâj » à l’Islam est aussi coranique, et nous avons discuté au sujet de l’islam-religion, du sens à donner aux linéaments culturels et rituels que le Coran fournit.[18]

– Ainsi, en matière de religion, le Coran confère-t-il aux différentes révélations un rôle d’impulsion à partir d’une double vectorisation ; shir‘a/voie générale et minhâj/voie spécifique. Cette conception bipartite explique que le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam aient à la fois des points communs, la part de Dieu, tant en matière de voie générale que de voie spécifique, et des différences : la part des hommes. Ceci justifie aussi que chacune de ces grandes religions monothéistes présente en interne une grande variabilité en fonction des développements qui jalonnèrent l’histoire de leurs constructions humaines. De fait, le Judaïsme comme le Christianisme et l’Islam sont des entités distinctes, mais aussi elles-mêmes composites et représentées en réalité par des dizaines de branches.

Or, le Coran validant cette pluralité, le principe moteur de cette variabilité s’applique de même à ce que sera l’Islam postérieurement à la Révélation. En effet, le segment-clef : « à chacun d’entre vous Nous avons indiqué une voie générale/shir‘a et une voie spécifique/minhâj » ne concerne pas uniquement selon ce verset l’existence du Judaïsme et du Christianisme, mais aussi celle de l’Islam puisqu’il est dit « à chacun d’entre vous » et non à « chacun d’entre eux », c’est-à-dire les juifs et les chrétiens, et que les allocutaires directs de ce verset sont bien les primo-partisans de Muhammad.

Conséquemment, ceci explique sous un autre aspect que jamais le Coran ne qualifie ni ne définit l’Islam en tant que religion/dîn al–islâm, puisque l’entité théorique initiale, au moment coranique, n’est qu’un élan qui par essence sera appelé à produire des formes religieuses diverses que les premiers théologiens nommeront Islam.[19] Enfin, ce n’est que l’usage post-coranique et la construction religieuse de l’orthodoxie historiquement établie qui imposeront le concept d’Islam compris en tant qu’entité unique alors que la réalité, mise en relief par ce verset, correspond bien à l’existence “d’islams”.

Conclusion

Indubitablement, le Coran atteste de la validité aux yeux de Dieu de la pluralité des religions. Pour lui, l’aspect formel des religions n’a en soi pas de valeur, si ce n’est d’être un creuset de sens et d’expression de la foi personnelle. Entre autres conséquences de ce postulat, nous en déduisons que ceci vaut non seulement pour la comparaison des religions monothéistes entre elles, Judaïsme, Christianisme et Islam, mais suppose aussi la pluralité confessionnelle de chacune.

– Ce principe coranique s’oppose donc aux conceptions que les hommes ont de leurs religions. Selon le Coran, il ne peut ainsi y avoir de religion référente, d’orthodoxie, et toutes les manifestations des entités monothéistes ont même valeur et raison d’être.

– Concernant l’Islam, les formes dites Sunnisme, Shiisme, Ibâdisme, etc., ne sont alors que des formes religieuses historiques parmi d’autres. Des manifestations diverses d’un principe unique : le credo monothéiste et l’adoration due à Dieu : prière, jeûne, aumône, tel qu’impulsé et insufflé dans l’Histoire par le Coran.

– Par conséquent, toutes les religions sont équivalentes et aucune ne peut prétendre à plus de vérité qu’une autre.

Plus généralement encore, cette approche coranique déconstruit le concept électif et exclusif que les trois religions monothéistes pourtant partagent et au nom duquel elles s’opposent, qu’il s’agisse de « Peuple élu », de « Nation élue » ou de « Communauté élue », voir, La Oumma, la meilleure communauté.[20] Le paradigme inclusif coranique diverge considérablement, mais positivement, du paradigme d’exclusive commun aux trois religions monothéistes.

En mettant intrinsèquement toutes les religions monothéistes sur le même pied d’égalité, ce paradigme coranique élargit considérablement les perspectives interreligieuses : dialogue et respect. Plus encore, cette ouverture à l’autre au nom de la foi et de la Révélation sous-tend comme elle le sous-entend le Salut universel[21] et, irradiant, l’Amour universel.[22]

En synthèse, selon le Coran, la racine de l’arbre du Monde est la Révélation, le tronc commun des religions est le credo monothéiste, ses ramifications en sont les diverses branches florissantes et fleurissantes. En ces conditions, il n’y aurait fondamentalement point de raison à ce que leurs fruits aient un goût amer, si ce n’est la raison humaine…

 

[1] Cf. Le Salut universel selon le Coran et en Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/23/le-salut-universel-selon-le-coran-et-en-islam/

[2] Nous avons étudié les autres occurrences de ce terme au combien clef en La Charia selon le Coran et en Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2016/10/02/la-charia-selon-coran-et-en-islam/

[3] Cf. Le terme islâm selon le Coran : l’Islam-relation : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/21/le-terme-islam-selon-le-coran-lislam-relation/

– Le Salut universel selon le Coran et en Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/23/le-salut-universel-selon-le-coran-et-en-islam/

[4] Cf. Violence et religions, l’Islam et le Coran : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/23/le-salut-universel-selon-le-coran-et-en-islam/

[5] Cf. Le Salut universel selon le Coran et en Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/23/le-salut-universel-selon-le-coran-et-en-islam/

[6] Cf. Introduction à la traduction littérale du Coran : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/22/traduction-litterale-du-coran/

[7] S5.V48 :

»وَأَنْزَلْنَا إِلَيْكَ الْكِتَابَ بِالْحَقِّ مُصَدِّقًا لِمَا بَيْنَ يَدَيْهِ مِنَ الْكِتَابِ وَمُهَيْمِنًا عَلَيْهِ فَاحْكُمْ بَيْنَهُمْ بِمَا أَنْزَلَ اللَّهُ وَلَا تَتَّبِعْ أَهْوَاءَهُمْ عَمَّا جَاءَكَ مِنَ الْحَقِّ لِكُلٍّ جَعَلْنَا مِنْكُمْ شِرْعَةً وَمِنْهَاجًا وَلَوْ شَاءَ اللَّهُ لَجَعَلَكُمْ أُمَّةً وَاحِدَةً وَلَكِنْ لِيَبْلُوَكُمْ فِي مَا آَتَاكُمْ فَاسْتَبِقُوا الْخَيْرَاتِ إِلَى اللَّهِ مَرْجِعُكُمْ جَمِيعًا فَيُنَبِّئُكُمْ بِمَا كُنْتُمْ فِيهِ تَخْتَلِفُونَ   «

[8] Pour ce volet de notre méthodologie d’analyse littérale du Coran, voir : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/23/analyse-lexicale/

[9] La racine nahâja signifie tracer un chemin à quelqu’un.

[10] Cf. La Umma, la meilleure communauté selon le Coran et en Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/27/la-oumma-la-meilleure-communaute-selon-le-coran-et-en-islam/

[11] Pour ce volet de notre méthodologie d’analyse littérale du Coran, voir : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/23/analyse-contextuelle/

[12] Voir aussi : « Si Dieu l’avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté… », S16.V93 ; « Si ton Seigneur l’avait voulu, tous les hommes sur Terre eussent été croyants. Sache donc que tu n’as pas à contraindre les gens afin qu’ils croient. », S10.V99 ; « Tu n’as pas à guider les hommes… », S2.V272.

[13] Ex. : S2.V82 ; S3.V57 ; S5.V9, etc.

[14] Sur les notions de Foi innée ontologique et foi universelle, voir : Foi et non-foi, îmân et kufr selon le Coran et en Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2018/02/14/foi-et-non-foi-iman-et-kufr-selon-le-coran-et-en-islam-2/

[15] La racine balâ signifie tout aussi bien éprouver qu’exposer. Ce verset justifiant positivement la pluralité religieuse, il ne fait guère sens de considérer cela comme une épreuve : balâ’. Aussi, selon cette logique : la pluralité religieuse comme mode d’expression de la foi de chacun, avons-nous traduit ce verbe par exprimer.

[16] S49.V13 : «يَا أَيُّهَا النَّاسُ إِنَّا خَلَقْنَاكُمْ مِنْ ذَكَرٍ وَأُنْثَى وَجَعَلْنَاكُمْ شُعُوبًا وَقَبَائِلَ لِتَعَارَفُوا إِنَّ أَكْرَمَكُمْ عِنْدَ اللَّهِ أَتْقَاكُمْ إِنَّ اللَّهَ عَلِيمٌ خَبِيرٌ »

[17] Pour la racine shara‘a et la notion de voie, voir l’article La Charia selon le Coran et en Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2016/10/02/la-charia-selon-coran-et-en-islam/

Le terme shir‘a a été légèrement moins surinvesti que celui de sharî‘a. Cependant, l’exégèse classique lui a tout de même conféré le sens de Loi, construction spéculative que nous retrouvons en bien des traductions où le terme shir‘a est rendu en ce verset par législation !

[18] Cf.  – Le (terme) islâm selon l’Islam : l’Islam-religion : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/21/le-terme-islam-selon-lislam-lislam-religion-la-shahada-ou-double-attestation/

Le Coran et l’Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/21/le-coran-et-lislam/

[19] Cf. Le (terme) islâm selon l’Islam : l’Islam-religion : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/21/le-terme-islam-selon-lislam-lislam-religion-la-shahada-ou-double-attestation/

et : Le terme islâm selon le Coran : l’Islam-relation : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/21/le-terme-islam-selon-le-coran-lislam-relation/

[20] Cf. La Oumma, la meilleure communauté selon le Coran et en Islam :

https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/27/la-oumma-la-meilleure-communaute-selon-le-coran-et-en-islam/

[21] Cf. Le Salut universel selon le Coran et en Islam : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/23/le-salut-universel-selon-le-coran-et-en-islam/

[22] Cf. L’amour de Dieu selon le Coran et en Islam, l’Amour universel : https://www.alajami.fr/index.php/2018/01/20/lamour-de-dieu-selon-le-coran-et-en-islam-lamour-universel/

Un parchemin ancien dévoile les apports de la médecine islamique du Moyen Âge à l’Irlande

Un parchemin ancien dévoile les apports de la médecine islamique du Moyen Âge à l’Irlande dans histoire culture Coran-ancien-Irelande-1-758x480

Dans l’Irlande verdoyante et hospitalière, où il fait bon vivre pour la plupart des 65 000 musulmans qui y ont élu domicile, la récente découverte d’un manuscrit médiéval datant du 15ème siècle, écrit en gaélique irlandais, a révélé au grand jour combien le prodigieux savoir médical du monde islamique avait influencé la terre du trèfle à trois feuilles.

En avance sur leur temps, les connaissances acquises par les médecins et autres biologistes musulmans du Moyen Age constituaient une mine précieuse d’enseignements dans laquelle puisaient les médecins européens et irlandais de l’époque, à la fois pour approfondir leurs propres recherches et enrichir les cours dispensés aux jeunes étudiants.

« Nous avons découvert que les médecins irlandais au cours des années 1400 exploitaient les connaissances médicales de médecins et de biologistes musulmans du monde islamique », a indiqué le professeur Pádraig Ó Macháin en conférence de presse. Cet éminent chercheur a mis en lumière, grâce à l’étude minutieuse d’un parchemin ancien traitant de la physiologie des mâchoires, du nez et du dos, la domination médico-scientifique indéniable, proche de la fascination, qu’exerçaient en Europe en général, et en Irlande en particulier, les savants musulmans de l’âge d’or de l’islam.

Ibn Khalaf al-Murādī, le Léonard de Vinci de l’islam

Ibn Khalaf al-Murādī, le Léonard de Vinci de l’islam dans histoire culture ibn-khalaf

Ibn Khalaf al-Murādī, le Léonard de Vinci de l’islam

 

Savant andalou et musulman ayant vécu dans l’Espagne divisée des Taïfas du 11ème siècle chrétien, Aḥmad Ibn Khalaf al-Murādī aura été l’un des plus remarquables inventeurs médiévaux. Sa vie et son parcours ne nous sont guère connus, mais sa seule oeuvre ayant traversé le temps, le Kitāb al-asrār fī natā’ij al-afkār (Le Livre des secrets résultant des pensées) aura été suffisante pour le faire entrer au panthéon des grands érudits. En fait recopié dans une autre oeuvre, celle d’Ibn Sid, un savant musulman ayant travaillé à la cour d’Alphonse X, l’ouvrage de l’Andalou contient 30 chapitres faisant la description de nombreux appareils et automates d’époque. Entre des maquettes de machine volantes, une bicyclette, et même, un scaphandre, l’on pouvait encore trouver des objets pour le moins improbables. Sa clepsydre aux gazelles, sorte d’horloge à eau ludique, mettait ainsi en scène de petits personnages évoluant dans un palais, le tout mis en mouvement par l’eau, du mercure et des poulies. Grâce à un similaire procédé hydraulique, il avait encore créé le premier calendrier automatique de l’histoire. Avec al-Zarqali, astronome le plus renommé de son temps, il réalisera encore la maquette d’un astrolabe voulu comme universel. Tout comme Léonard de Vinci plus tard, qui n’est pour beaucoup que son pendant latin, il s’intéressera à l’art de la guerre. Il avait ainsi imaginé une machine de guerre consistant en un bélier posé sur une plateforme s’élevant grâce à un jeu de poulies et de cordes afin d’abattre les fortifications ennemies. Sa date de naissance, et de décès, nous sont toutes deux inconnues.

L’arrivée dʿUmar ibn al-Khaṭṭāb à Jérusalem

Occupée par des Byzantins puis par des Perses, Jérusalem est conquise en 17 de l’hégire (638) par les musulmans, alors sous les ordres du deuxième calife de l’islam, ʿUmar ibn al-Khaṭṭāb. La ville est prise sans violence, les dignitaires chrétiens leur font un accueil plutôt favorable; on offre au calife les clés de la ville qui est même invité à faire ses prières dans l’Église de la Résurection. Mais c’est en fait Ilia que les musulmans ont conquis, sa voisine nouvellement édifiée par les Romains après la destruction de Jérusalem six siècles plus tôt. De cette dernière il ne restait que des ruines. Comme pour mieux humilier les juifs, les autorités avaient alors fait du Temple cher aux juifs un dépotoir dans lequel les eaux usées s’étaient écoulées depuis des siècles. Ilia est cependant très vite agrandie, pour finalement intégrer l’ancienne Jérusalem, qui renait ainsi de ses cendres. Jérusalem réhabilitée, ʿUmar ibn al-Khaṭṭāb y fait nettoyer le Mont et ériger la Mosquée al Aqsa ; les juifs sont grâce aux musulmans réautorisés à y entrer afin d’accomplir leurs rites. Certains juifs étaient allés jusqu’à voir en ʿUmar un véritable libérateur mettant fin au cycle des persécutions anti-juives ; pour d’autres, il était l’instigateur de la reconstruction du Temple de Salomon comme prédit dans leurs écrits.

Renaud K.

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Lorsque le Monde parlait Arabe (Complet) | Documentaire FR

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SELON LE CORAN, IL N’Y A AUCUNE OBLIGATION D’EFFECTUER LE CULTE EN ARABE

La plupart des gens dans la société ont été conditionnés à croire que le culte, par exemple la prière et la récitation des versets doivent se faire en arabe. Mais nous voyons dans le Coran beaucoup de versets où Allah nous ordonne de méditer sur les versets du Coran, de réfléchir tels que « né réfléchissez-vous pas ? Ne raisonnez-vous pas ? etc.

[Voici] un Livre béni que Nous avons fait descendre vers toi, afin qu’ils méditent sur ses versets et que les doués d’intelligence réfléchissent! [Coran, 38:29]

Les gens ne peuvent méditer et réfléchir sur quelque chose qu’ils ne comprennent pas. Forcer les gens à lire et à adorer sans comprendre est une négation de ces versets. C’est aussi l’une des méthodes trompeuses de satan. « Nulle contrainte en religion.. » [Coran, 2: 256] Cette situation est également contraire à ce verset.

Comme les autres cultes, effectuer la Salat et prier avec une langue inconnue s’oppose au Coran. Parce qu’Allah dit dans le Coran: Ô les croyants! N’approchez pas de la Salat alors que vous êtes ivres, jusqu’à ce que vous compreniez ce que vous dites… (Coran, 4: 43)

La seule situation dans laquelle une personne ne peut pas effectuer la Salat est l’état d’ébriété jusqu’à comprendre ce qu’elle dit. C’est LA SEULE INTERDICTION. Mais, si l’on (reprend conscience) commence à comprendre ce qu’on dit, on doit effectuer la Salat.
Lire le Coran en arabe peut être considéré comme une bonne chose, mais forcer les musulmans qui ne connaissent pas l’arabe à prier ou à adorer en arabe est inutile. Affirmer qu’Allah désire un culte que nous ne comprenons pas signifie la sacralisation de l’arabe. Cela rend la religion déraisonnable. Nous pouvons prier et accomplir d’autres cultes plus consciemment avec le langage que nous connaissons. Parce qu’ALLAH CONNAÎT TOUTES LES LANGUES ET TOUTES LES LANGUES ONT ÉTÉ CRÉÉES PAR ALLAH.

Et parmi Ses signes la création des cieux et de la terre et la variété de vos idiomes et de vos couleurs. Il y a en cela des preuves pour les savants. (Coran, 30:22)

Comme le dit le Coran, si vous suivez ce sur quoi vous avez trouvé vos pères, vous vivez la religion de vos ancêtres et non pas l’islam.
Pour résumer, le Coran est notre Livre et il nous suffit. Il y a tout ce dont nous avons besoin dans le Coran et il a été révélé pour qu’il soit compris. Le Coran, le guide des musulmans est également très compréhensible. Le monde se transforme en Paradis lorsque nous suivons le Coran et nous ne devrions pas oublier que nous allons être interrogés seulement du Coran dans l’Au-delà. (Coran, 43: 44)

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Quand la France sonnait le canon pour la fin du ramadan

Entre une pointe d’orientalisme et la volonté de raconter un islam intime et pacifique, redécouvrez le traitement du ramadan dans les médias français des années 30.

Avant l'Aïd à la fin du mois de ramadan en 1939, à la Mosquée de Paris.
Avant l’Aïd à la fin du mois de ramadan en 1939, à la Mosquée de Paris.• Crédits : Keystone-France/Gamma-RaphoGetty

L’Aïd el-Fitr, qui marque la fin du ramadan, s’annonce cette année pour le 14 juin au soir en France. Sur les réseaux sociaux ou dans les messages adressés au médiateur de Radio France, des lecteurs déplorent parfois la place accordée par les médias en général et France Culture en particulier au ramadan et à l’observance chez les musulmans. Mais saviez-vous qu’en 1935, on sonnait le canon en France pour annoncer la fin du ramadan ?

On l’apprend en parcourant Le Petit journal, et ses éditions des années 30 sur le site des archives de presse Retronews. “Un coup de canon dans les villes, le chant du marabout dans les campagnes annonceront ce soir que la période d’abstinence s’achève. Voici trente jours que, du lever au coucher du soleil, les mahométans n’ont pris aucune nourriture”, écrit le quotidien parisien dans son édition du 6 janvier 1935.

 

Républicain et conservateur, Le Petit journal disparaîtra à la Libération, en 1944, confondu pour avoir reçu des financements de Vichy sous l’Occupation. Mais une décennie plus tôt, en 1935, il fait plutôt oeuvre de pédagogie en matière d’islam, non sans une pointe d’ironie : “A la tombée de la nuit, les musulmans de Paris pourront passer à côté d’un infidèle qui mâchonne un cigare ou tire des bouffées de sa cigarette sans porter la main à sa bouche pour éviter qu’un atome de fumée y pénètre.” Mais que se passe-t-il du côté du cercle polaire, si les journées durent 23 heures, soleil de minuit oblige ? La réponse est dans l’article, qui cite les autorités de la mosquée de Paris : “Le Coran permet de prendre une moyenne car le ramadan n’est pas une épreuve inhumaine”.

Plus loin, Le Petit journal explique encore que le mouton du beiram que les musulmans tueront un peu partout en l’honneur de la fin de trente jours de jeûne, “rappelle celui que l’Ange Gabriel apporta du ciel et plaça sous le couteau d’Abraham pour sauver la vie d’Isaac”.

Il y a près d’un siècle, la presse relatait plutôt avec bienveillance ramadan et Aïd el-Fitr, peut-on découvrir en parcourant le site des archives de presse de la BNF. Il s’agit d’abord du ramadan dans le monde musulman (Algérie, protectorats et pays arabes) et pas chez les musulmans installés en France. Sirop de violette et velours vert épinard, Le Figaro racontait ainsi pour sa part avec un brin d’orientalisme mais globalement de la sympathie la fin du ramadan, trente ans plus tôt. C’était sous la plume de la Française Jeanne Puech, qui signait sous pseudo Jehan d’Ivray. Mariée à un Egyptien, elle chroniquait ainsi la fin du Ramadan en Egypte dans le quotidien français en 1906 :

C’est là le beau côté de cette religion et de ce pays extraordinaire où il semble que le soleil en brûlant les fronts réchauffe les cœurs. Plus que partout ailleurs, ici, la fête est générale, et le peuple, si misérable soit-il, a sa part de toutes les joies.

Puis la presse s’invite à la Mosquée de Paris ou chez les musulmans de France, qu’elle appelle encore parfois « indigènes ou mahométans« , mais de plus en plus « musulmans« . En 1936, Paris Soir vante ainsi « les pâtes de fruits odorantes qui circulent à la Mosquée de Paris » où le quotidien a envoyé un journaliste pour chroniquer l’Aïd.

Dans les archives radiophoniques, la toute première évocation du ramadan remonte à 1938, avec un sujet sur le mois de jeûne en Tunisie. Mais dès 1946, un reportage sonore de trois minutes raconte la fin du ramadan depuis la Mosquée de Paris, darboukas et chants religieux au micro. Malgré la piètre qualité du son qui pique un peu les oreilles, vous pouvez tout de même vous replonger dans ce document qui raconte un traitement bienveillant de l’islam par les médias à l’époque. C’était il y a 72 ans et le journaliste Claude Darget achevait son reportage sur ces mots :

Il ne me reste plus qu’à souhaiter à nos amis musulmans de Paris de pouvoir suivre fidèlement leurs préceptes religieux car si jeûner est quelque fois désagréable, ne pas jeûner reste un problème monétaire ardu

 

https://www.franceculture.fr/histoire/ramadan-dans-les-archives?fbclid=IwAR3QCLfmxhFPOPIiC_c-Uj8VWrOyYBFgOELyHXqKSUnK0vySX7PRYWNoy2k

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